Art & Architecture
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Partez à la découverte d'un célèbre peintre de portraits mondains de la première moitié du XIXe siècle.
Ce portrait de Madame Augustin de Lapyrière, née Elise-Cécile Cardon, la présente dans une pose mi-mélancolique, mi-inspirée, typique du romantisme : le regard est songeur, la plume et le papier sont à portée de main, de même que quelques livres, fermés. Accoudée sur un canapé orangé, dont la couleur s’accorde au grand drapé de l’arrière-plan, la svelte silhouette noire se détache, mettant en valeur ses épaules dénudées selon la mode du début de la monarchie de Juillet. Avec le retour des corsets, des manches « à gigot » et des jupes plus volumineuses, la silhouette est structurée, les robes sont unies, généralement de couleur sombre. Ses cheveux sont coiffés de « clotildes », les futures « anglaises », se perdant autour du cou et réparties de part et d’autre d’une raie centrale.
Éxécuté par Claude-Marie Dubufe, ce portrait a sans doute été peint entre 1835 et 1840. En effet, l’artiste a présenté au Salon de Paris pendant ces années trois tableaux sous le nom de « Madame de L. », laissant penser que ce tableau y a été exposé. Claude-Marie Dubufe jouit d’une grande renommée au sein de la haute société parisienne et française, ayant commencé une carrière de portraitiste dès 1811. Son succès lui vaut pratiquement chaque année une exposition au Salon. Rival de Franz Xaver Winterhalter, Édouard Dubufe devient l'un des portraitistes officiels les plus célèbres du Second Empire. Proche du pouvoir, il peint les portraits officiels de Napoléon III et de l'impératrice Eugénie.
Le portrait conservé au château de Bussy-Rabutin s’inspire des grands portraits d’Ingres, avec des lignes très dessinées. Le traitement des étoffes et des accessoires est sans doute ce qu’il y a de plus remarquable dans ses œuvres. Le critique Champfleury rapporte en 1846 que « Monsieur Dubufe était chéri des femmes de son temps presque autant qu’Alexandrine, la couturière. Comme il les habillait élégamment, comme il savait les avantager et comme il était flatteur ».
Dans ce portrait, Madame Augustin de Lapyrière apparaît non seulement comme une femme élégante et cultivée, mais aussi attirée par l’écriture. Epouse d’Augustin de Lapyrière, le très riche receveur général des finances du département de la Seine, elle devait sans doute partager son goût pour les arts. Ce dernier est en effet l’un des plus importants collectionneurs d’art des années 1820, avant la première faillite de la famille. Il appréciait notamment les peintures hollandaises du XVIIe siècle, comme des Veermer et des Rembrandt, mais aussi la peinture française et espagnole du XVIIe siècle [Catalogue de tableaux précieux et autres objets de curiosité, formant le Cabinet de M. Lapeyrière, Receveur-Général des Contributions du département de la Seine. Par Henry Bon-Thomas, Commissaire-Expert des Musées Royaux].
Il existe un portrait en miniature de Madame Augustin de Lapeyrière, plus traditionnel, exécuté par Daniel Saint. C’est encore une femme de lettres qui apparaît avec un livre, mais cette fois-ci au sein d’une nature propice à la rêverie. La pose en est nettement plus artificielle, en dépit de l’animation créée par les reflets de la robe en satin et du châle porté en négligé.
Claude-Marie, Édouard et Guillaume Dubufe : la peinture en héritage (1790-1909), Musée des Avelines - Musée d'Art et d'Histoire de Saint-Cloud, 15 mars 2018 - 24 juin 2018, Saint-Cloud, 2018.
Emmanuel Bréon, Claude-Marie, Edouard et Guillaume Dubufe, Portraits d’un siècle d’élégance parisienne, cat. exp., Paris, Délégation à l’Action Artistique de la ville de Paris, 1988.