Art & Architecture
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Partez à la découverte d'un thème iconographique prisé : le phare de Gênes
Jean-Joseph-Xavier Bidault (plus tard orthographié Bidauld) étudie à l’École des beaux-arts de Lyon, puis s'installe à Paris en 1783, et travaille pour le marchand d’art Dulac, pour lequel il copie les paysagistes des Pays-Bas (Berchem, Potter, Wouwerman ...). Contemporain de Pierre-Henri de Valenciennes et élève de Joseph Vernet à Paris entre 1783 et 1785, il bénéficie des conseils de ces deux grands paysagistes et partage une même préoccupation : représenter l’air, c’est-à-dire rendre à la fois la lumière, l’atmosphère et ses variations.
Son marchand d’art finance son voyage en Italie (1785-1790), où il étudie exclusivement des paysages. Jean-Joseph-Xavier Bidault prend alors l’habitude de peindre sur le motif : « M. Bidault [...] avait poussé la passion du paysage jusqu’à ce point d’aller s’établir des mois entiers devant un site, avec une toile de trois ou quatre pieds, de peindre sur place tout le jour [...] en dépit des accidents même de la température, et de ne quitter son poste qu’après avoir fini son tableau » (Désiré Raoul-Rochette, « Notice historique sur la vie et les ouvrages de M. Bidault »). En dépit de cette pratique du travail en plein air, ce paysage a été recomposé à la manière d’un paysage historique, constitué de plans séparés grâce auxquels il construit sa perspective, selon les principes bien assimilés du paysage classique du XVIIe siècle.
Il reçoit nombre de commandes officielles à son retour de Rome : en 1791, Charles IV d'Espagne lui passe commande de quatre toiles pour la Casita del Labrador au palais royal d'Aranjuez. En 1807, il peint quatre toiles pour le salon Murat du palais de l'Élysée à Paris. En 1817 puis en 1822, il réalise deux compositions pour la galerie de Diane du château de Fontainebleau. Enfin, en 1818, il reçoit commande de toiles pour le château de Maisons.
Le port de Gênes est un motif qui a déjà été traité avec Claude Gelée dit Le Lorrain, vue aujourd’hui conservée au musée du Louvre, mais qui demeure relativement rare. Premier port ligure, Gênes est déjà reliée à Rome par la voie Aurélia à l’époque impériale, puis la république maritime connaît des luttes acharnées contre Pise et Venise. Vers la fin du XVIIIe siècle, la République aristocratique est balayée par les convulsions révolutionnaires. Le port ligure est un point d’entrée stratégique pour de nombreuses marchandises, dont certaines sont acheminées jusqu’en Suisse et c’est la raison pour laquelle le bateau représenté arbore deux drapeaux suisses. La résistance de la cité est héroïque lors du fameux siège de 1800, appuyée par les Français de Masséna, avant d’être incorporée par l’Empire de Napoléon jusqu’à la chute de l’empereur. En 1815, elle est réunie au Piémont.
La référence à Le Lorrain est manifeste dans ce tableau, avec cette lumière dorée et rosée caractéristique du peintre lorsqu’il exécute des vues de port au levant du soleil couchant, comme dans le paysage avec l'embarquement à Ostie de sainte Paule Romaine conservé au musée du Prado à Madrid. L’animation du premier plan grâce à des personnages déchargeant sac et tonneaux est absorbée dans l’ombre, laissant le ciel entre bleu lavande et rose doré assurer un puissant effet décoratif.
Marie-Madeleine Aubrun, « La tradition du paysage historique et le paysage naturaliste dans la première moitié du XIXe siècle français », L’Information d’histoire de l’art, no 2,1968, p. 63-72.
Anna Ottani Cavina, Paysages d’Italie, les peintres du plein air, Paris, RMN, 2001.
Suzanne Gutwirth, « Jean-Joseph Bidauld. Une sensibilité néoclassique », Jean-Joseph-Xavier Bidauld (1758-1846). Peintures et dessins [cat. exp. Carpentras, musée Duplessis ; Angers, musée des Beaux-Arts ; Cherbourg, musée Thomas-Henry, 1978], Nantes, imp. Chiffoleau, 1978, n.p.
Désiré Raoul-Rochette, « Notice historique sur la vie et les ouvrages de M. Bidault », 6 octobre 1849, Procès-verbaux de l’Académie des beaux-arts, 1845-1849, Paris, École des Chartes, 2008, t. VIII, p. 456-457.