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Portrait de « Bartholomeus Bongus », juriste italien

Partez à la découverte du plus mystérieux portrait de la collection.

Présentation de l'oeuvre

École italienne du début XVIIe, Portrait de Bartholomeus Bongus. Huile sur toile, 194,5 x 112,3 cm. Château d’Aulteribe (Sermentizon)

© Centre des monuments nationaux/Philippe Berthé

L’histoire matérielle du portrait est en soi énigmatique, puisque le tableau est agrandi en partie basse sur cinq centimètres. Deux grandes incrustations sont visibles sur la surface picturale, peut-être dues à une transposition d’un support bois vers une toile. Le tableau porte une inscription : « Bartholomeus Bongus Aeque Ann.Dni. MCDXVI », « également Bartholomeus Bongus, 1416 » ainsi qu’un motif héraldique à champ rebattu alterné (répétition de motifs binaires alternant deux couleurs), c’est-à-dire avec un nombre impair de séparation : Fascé d'or et de gueules de six pièces, armoiries répertoriées dans CAMOZZI VER - TOVA DE GHERARDI (1994) et sont celles de la famille Bonghi.

École italienne du début XVIIe, Portrait de Bartholomeus Bongus. Huile sur toile, 194,5 x 112,3 cm. Château d’Aulteribe (Sermentizon)

© Centre des monuments nationaux

Le portrait possède le même encadrement que celui qui lui fait pendant, et qui s’avère être un portrait de Christine de Lorraine (1565-1637) par Giusto Sustermans. Ces deux tableaux ont peut-être été achetés ensembles, et donc avoir potentiellement un rapport entre eux, à moins qu’il ne s’agisse que d’un strict accrochage décoratif de deux portraits en pied, comme le suggère l’agrandissement en basse de cinq centimètres.

Le nom peint sur le tableau d’Aulteribe, Bartolomeo Bongus, est en fait celui de Bartolomeo Bonghi, juriste italien du XVIe siècle dont un portrait est conservé au Metropolitan museum de New York. La notice du Metropolitan museum précise que l’œuvre est exposée pour la première fois à Londres, en juin 1861, est dénommée alors « Bartholomeus Bongus ». Le tableau du Metropolitan museum, restaurée en 1991, a permis d’ôter un blason qui avait été ajouté au XIXe siècle, que l’on retrouve encore dans certaines copies. Il est à noter que ce docteur en droit civil et canon est représenté avec un livre, et non une épée comme dans notre portrait d’Aulteribe.

Sur le deuxième portrait de Bartolomeo Bonghi, passé en vente publique, une inscription et une date « BARTHOLOMEVS BONGVS L.V.D./CAN.ET PRIMICER. CATH.BERG./ PROTHONOT.APPLICVS.COMES.ET AE QV./ ANNO.DNI.MDLXXXIV' (centre gauche), qu’il faut comprendre comme « Bartholomeus Bongus. I(uris) U(triusque) D(octor) / Can(onic)us et Pri - micer(i)us Cath(edrae) Berg(omensis) / Pro - thonot(arius) Ap(ostho)licus Comes et Ae - ques / Anno D(omi)ni MDLXXXIV».

La date portée sur le tableau est 1584 (MDLXXXIV), alors que le portrait d’Aulteribe porte la date de 1416 (MCDXVI). Le tableau d’Aulteribe a donc bien à voir avec celui de Giovanni Battista Moronni (v. 1525-1578) par le lien des armoiries, mais ne représente pas le même personnage. Celui d’Aulteribe porte une épée, et est vêtu à la mode de la fin du XVIe siècle, voire même du début du XVIIe siècle.

Le peintre de ce portrait en pied, maladroit et qui paraît même inachevé en partie basse et peu détaillé en ce qui concerne l’arrière-plan, est peut-être un suiveur d’Antonio Moro de son véritable nom Anthonis Moor Van Dashorst (1517-1576), qui place le blason de son commanditaire sur certains portraits, à moins qu’il ne s’agisse d’un suiveur de Giovanni Battista Moroni (v. 1525-1578). Ce portrait n’a de plus rien à voir avec celui de Christine de Lorraine qui lui fait face. Il s’agit bien là d’un accrochage a effet décoratif.

oeuvre à la loupe

Pour aller plus loin

Claudia Bussolino, « Il rittratto di un rettore del XVI secolo : BARTOLOMEO BONGHI”, Almum Studium Papiense, 1.II, Cisalpino, Milano 2013, p. 1059-1064.

F. Zeri et E.E., Gardner Peintures italiennes. Un catalogue de la collection du Metropolitan Museum of Art. École d’Italie du Nord,1986, p. 46.

Autrice de la notice

morwena.jpg

Morwena Joly-Parvex

Conservatrice du patrimoine

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